LE CULTE DU CARGOLe culte du cargo est un ensemble de rites « millénaristes » qui apparaissent chez les aborigènes, notamment en Mélanésie (Océanie), en réaction à la colonisation. Il consiste à imiter les opérateurs radios américains et japonais commandant du ravitaillement en espérant déboucher sur les mêmes effets. En effet les indigènes ignorent l'existence et les modalités de production occidentale ; dès lors ils attribuent l'abondance et la sophistication des biens apportés par cargo à une faveur divine.
Le culte a pris naissance en Mélanésie. Quasiment toute la Mélanésie, des îles Fidji à la Papouasie-Nouvelle-Guinée l'adopta simultanément - à l'exception de la Nouvelle-Calédonie. Mais ce culte ne connaîtra une longévité exceptionnelle qu'à Tanna.
Des indigènes, ayant constaté que les radio-opérateurs des troupes au sol semblaient obtenir l’arrivée de navires ou le parachutage de vivres et de médicaments simplement en les demandant dans leur poste radio-émetteur, eurent l’idée de les imiter et construisirent, de leur mieux, de fausses cabines d’opérateur-radio — avec des postes fictifs — dans lesquels ils demandaient eux-aussi — dans de faux micros — l’envoi de vivres, médicaments et autres équipements dont ils pouvaient avoir besoin. Plus tard, ils construiront même de fausses pistes d'atterrissage en attendant que des avions viennent y décharger leur cargaison.
L’île de Tanna fait partie des archipels Vanuatu, situées en Mélanésie à l’ouest des îles Fidji et à l’est de l’Australie. Habitées depuis des millénaires par les peuples de l’Océanie, ces archipels ont respectivement été explorés par les Portugais (1606), les Français (1768) et les Anglais (1774), administrant ces îles conjointement à partir de 1887. Durant la Seconde Guerre mondiale, la présence des Japonais et des Américains dans le Pacifique, ainsi que l’abondance de leurs équipements et de leurs biens, ont donné un nouveau souffle aux mouvements et aux idées « cargoïstes « . L’indépendance des archipels s’est faite en 1980.
Peter Lawrence a écrit, en 1974, dans son livre intitulé Le Culte du cargo (p. 297-298, éditions Fayard) :
« Les indigènes ne pouvaient pas imaginer le système économique qui se cachait derrière la routine bureaucratique et les étalages des magasins, rien ne laissait croire que les Blancs fabriquaient eux-mêmes leurs marchandises. On ne les voyait pas travailler le métal ni faire les vêtements et les indigènes ne pouvaient pas deviner les procédés industriels permettant de fabriquer ces produits. Tout ce qu’ils voyaient, c’était l’arrivée des navires et des avions. »
Le mouvement, le mythe, religion ou terme culte du cargo s’est forgé à travers les théories anthropologiques et études sur les civilisations du Pacifique. Il est la fusion entre, premièrement, les enseignements de missionnaires chrétiens du XIXe siècle, deuxièmement l’abondance des richesses matérielles qui arrivaient par bateaux et plus tard au XXe siècle par avion, ainsi que les croyances mythologiques autochtones ancestrales confrontées au style de vie des Asiatiques, des Européens et des Américains.
L'observation du culte du cargo a conduit à un questionnement : ne sommes-nous pas parfois conduits à appliquer des méthodes par mimétisme, sans réelle réflexion sur le bien-fondé de nos démarches, en pratiquant une sorte de pensée magique alias pensée sauvage ?
Source Wikipédia