|texte] Minuit sonne

il fait noir, au loin une lumière blanche scintille.
Elle s éloigne doucement. Je suis empêtrée dans mon état psychique. Mes pensées sont lourdes, mais mon corps est léger. Je flotte dans les airs. Je glisse déçi delà de pièces en pièces, d immeubles en maisons. Je m incruste à l autre bout de la ville dans un appartement. Il est minuit moins le quart, les lumières sont éteintes. Il y a une masse sombre enfouie dans le canapé du salon plongé dans la pénombre. Je me laisse glisser vers le sol et je m assoie sur la place vacante dans les coussins. C est un homme débraillé , les cheveux en bataille, la chemise ouverte la tete dans les mains, ses epaules tressautent, il pleure.
Je le regarde émue, le chagrin m envahit et me noie. Je pose ma main sur son épaule, il se redresse, j entrevoie son visage défiguré par le chagrin à travers le voile de la nuit.
Ses lèvres bougent
- pourquoi ?
Et le silence retombe comme un couvercle sur le scène.
Je scrute son visage baigné de larmes. Je me rapproche encore et me blottit contre sa poitrine.
Baboum ! Baboum ! Baboum ! Je suis si près que j entends son coeur battre dans sa poitrine.
- ne pleure pas, dis je.
Mais son chagrin est incommensurable et le corps allongé contre le dossier, la tete renversée en arrière il continue de pleurer. Un sanglot fend la nuit par instant et la plainte résonne dans l appartement. Rien de ce que je peux faire n arrive apaiser cet homme.
Je sens sa chaleur, j entends sa respiration, je respire son odeur.
- ne t inquiète pas, ça va aller Daniel. Je suis là.
Mais , enfermé dans son désespoir il ne m entends pas.
Ring ! Ring ! Ring !
La sonnerie de son téléphone portable posé sur la table basse transperce la nuit.
Il se redresse et décroche en passant sa main rapidement pour s essuyer la figure.
- Allo ?
- Ici l hôpital Monsieur Daniel Buisson. Nous sommes désolés mes votre femme est décédée...
Elle est morte il y peu de temps, à minuit moins le quart pour être précis. Toutes nos condoléances Monsieur.
L Homme raccroche et deux larmes coulent sur ses joues. Toujours à ses côtés dans l appartement que nous avons habité pendant de nombreuses années, je le prends dans mes bras dans un dernier geste d amour.
- ça va aller, je t aime mumurais je.
Immobile dans un silence de plomb, résonne à sonnerie de l horloge ancienne.
Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong ! Dong !
Les douze coups de minuit retentissent.
Une lumiere blanche comme une tete d epingle apparait dans mon champ de vision. Elle grossit vite, tres tres vite. Daniel pleure en prononcant mon nom : chantal, ma chantal.
Je dépose un baiser brûlant sur sa joue humide. La lumière blanche m enveloppe et m attire. J ouvre mes bras qui étaient autour de mon bien aimé et je suis aspirée par la lumière.
La silhouette de l homme s éloigne et je quitte ce monde.

Désolée ça aurait pu être un peu plus joyeux .
Mais c est comme cela que je perçois la mort. Le grand voyage pour celui qui part
Et le chagrin pour elui qui reste

Non c'est vraiment très beau. Je me suis laissé emporter rapidement. La profondeur des émotions donne l'impression d'un témoignage plus que d'une histoire. Je ne trouve pas cela si triste à vrai dire, plutôt apaisant même, de savoir que la mort appelle à un nouveau voyage et à la fin d'une période qui a souvent été difficile.

Lorsque j'écris, je prends la peau de l'un de mes personnages pour resentir et pouvoir au mieux verbaliser les émotions qui me viennent. Bref je fais l'actrice...
C'est cela que je voulais retranscrire l'émotion et la solitude au moment de la mort.
Si proche que nous pouvons etre avec quelqu'un, nous sommes seuls au moment du grand départ.

Merci astyann

Je suis d'accord, s'immerger complètement dans le personnage et accepter de se dévoiler à travers lui rend les histoires plus belles.