Thèmes des légendes de laminakLes légendes portant sur les laminak tournent autour de grands thèmes récurrents :
L'habitat souterrainDe manière générale, on admet que les laminak vivent sous terre et sortent la nuit car ils ne supportent pas le soleil (ils s’enfuient au chant du coq). Ils habitent dans les grottes des montagnes ou sous les roches. En 1900, Sébillot note que « les cavernes du pays basque sont presque toujours la demeure des Lamignac ». Une de leurs demeures était le vieux donjon de Rocafort sur la colline de Gaztelu entre Saint-Martin-d'Arberoue et Isturitz. Sous la colline se trouvent les grottes d'Isturitz avec lesquelles une porte du château était dite communiquer.
On rapporte aussi que les laminak vivent auprès des sources et des ruisseaux. Parfois le thème de la demeure souterraine est directement lié à celui de l'eau, comme au pont d'Utsalea à Saint-Pée-sur-Nivelle où ils vivent sous l'arche ou encore aux grottes dites Laminenziluak (les trous des laminak), à Camou-Cihigue dans la Soule, où naissent trois sources dont une d’eau chaude à laquelle sont attribuées des propriétés curatives.
La porte de leur demeure s'ouvre lorsqu'on frappe le sol devant le seuil avec un bâton. L'intérieur ne diffère pas sensiblement de l'habitat du paysan basque. Les laminak y vivent en famille et ils ont des enfants.
La géographie du Pays basque ne se prive pas d'évoquer leur habitat au travers de nombreux toponymes. On trouve essentiellement des grottes : les cavernes des laminak (Lamien-leze à Zugarramurdi en Navarre, Laminen-ziluak, Laminzilo), le gouffre des laminak (Lamiosin près de Bera en Navarre) ; des rochers : la pierre des laminak (Lamiarri à Arizkun et à Bera, Lamiarriaga, Lamiarrieta) ; des puits : le puits des laminak (Laminosin à Juxue en Basse-Navarre, Lamisin, Lamuxain) ; des bords de rivières : Lamindania (moulin situé à Lacarry), le ruisseau des laminak (Lamiozingo erreka toujours près de Bera, Lamixain, Lamiñerreka), etc.
L'or des laminakLe thème de l’or est fréquemment associé aux laminak. Ils gardent des trésors dans certaines de leurs grottes. Les femmes laminak sont souvent décrites en train de peigner leur longue chevelure, auprès d'une source ou à l’entrée de leur maison, à l’aide d’un peigne d'or. Elles ont parfois une chevelure blonde comparée explicitement à l'or ou des vêtements dorés.
Le thème revient plusieurs fois sous la forme du vol du peigne d’or ou de cadeaux d'or faits par les laminak. Une légende illustrant typiquement ce dernier motif est la suivante : une lamina de la caverne d'Akelarre, près de Zugarramurdi, est sur le point d'accoucher. Son époux se rend à la ferme Lekuberri pour chercher une sage-femme. La maîtresse de maison l'accompagne à la caverne. En signe de gratitude, les laminak lui font don d'une quenouille et d'un fuseau en or mais elle ne devra pas regarder en arrière tant qu'elle n'aura pas franchi le seuil de sa maison. Pendant le trajet de retour, la femme entend de grands bruits mais elle a la présence d'esprit de ne pas se retourner. Sur le pas de sa porte, la curiosité est plus forte et elle regarde. Comme elle avait quand même un pied dedans, seule la moitié de ses cadeaux lui est enlevée.
Les activités nocturnesLes laminak travaillent la nuit. Ce sont des ouvriers doués et infatigables.
Les femmes laminak excellent en tant que filandières. Elles cousent et filent avec le fuseau et la quenouille. Quelques contes tournent autour du thème du linge extraordinairement blanc qu’elles lavent de nuit dans les rivières.
On attribue aux laminak de fabuleux talents de bâtisseurs. Plusieurs récits décrivent comment ils construisirent en l'espace d'une seule nuit un édifice, tels le pont de Licq, les maisons-fortes Donamartia (XIVe siècle) à Lecumberry ou Lastaunea (fin XIIIè siècle) à Ispoure, l’église d’Espès ou d’Arros, des maisons (ferme Larramendia à Juxue, maison Gentein àOrdiarp), un moulin comme à Lacarry ou un dolmen comme à Mendive. Pour se venger d’un paysan, les laminak pouvaient couvrir son champ, toujours en une seule nuit, de blocs de pierre énormes.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Panneaux à Licq-Atherey attribuant la construction du pont aux laminak.
La légende du pont de Licq est célèbre. Une version raconte que les laminak avaient passé un marché avec les gens du village. Ils construiraient le pont et, en échange, ils recevraient la plus belle fille de Licq. Au moment précis où les laminak allaient poser la dernière pierre, l'amoureux de la belle – qui bien sûr n’était pas satisfait de ce pacte - dupa les petites gens en faisant chanter un coq : croyant le jour venu, les laminak lâchèrent la pierre et se sauvèrent en toute hâte. Le bloc ne put jamais être remis en place par les villageois et il resta un trou.
Attitude à l’égard des humainsBien que certains auteurs systématisent leur comportement (génies de bonne volonté, protecteurs et bienveillants ; êtres ni bons ni mauvais ; entités carrément maléfiques), si l’on s’en réfère au corpus on constate que l’attitude des laminak à l’égard des hommes est ambiguë et peut varier du meilleur au pire, depuis une grande sympathie (abri offert et don spontané) jusqu’à une forte malignité (rapt de jeunes filles) en passant par des attitudes intermédiaires de vengeance justifiée, de pactes ou d’échanges de services.
L'assistance mutuelleD’autres récits soulignent par contre leur bienveillance. Parmi ceux qui décrivent les bonnes relations qu’ils entretiennent avec les hommes, plusieurs mettent en exergue leur besoin d'aide au moment de la naissance ou du trépas. Lorsque leur femme accouche, ils doivent faire appel à une sage-femme humaine ; lorsqu'ils sont à l'agonie, ils ne peuvent mourir que si un homme récite des prières à leur chevet.
Réciproquement, ils se montreront spontanément reconnaissants vis-à-vis de ceux qui leur font des petites offrandes de nourriture, en favorisant leurs récoltes ou en exécutant de bon cœur divers petits ouvrages pour leurs bienfaiteurs. Ils acceptent volontiers les mortels dans leurs maisons et leur font des dons : un homme fut contraint par l'orage à se réfugier dans une grotte. Un lamina l'accueillit et lui fit don à son départ d'un morceau de charbon. À l'air libre, le charbon se changea en or pur. Si d'aventure les humains perdent les cadeaux qui leur sont faits, c'est seulement par bêtise ou excès de cupidité.
Le mariage impossibleD’autres histoires qui se terminent toujours mal mettent en scène l’amour d’un berger pour une lamina. La plus triste raconte la mésaventure d’un jeune homme de la maison Korrione dans le quartier Garagarza à Arrasate qui rencontra une belle jeune fille dans la montagne près de la grotte de Kobaundi. Il tomba amoureux d’elle et lui promit le mariage. La mère du jeune homme le mit en garde : savait-il bien au juste qui était son amoureuse ? Si elle avait des pieds d’oie, c’était une lamina. Le jeune homme découvrit la vérité sur sa belle et en conséquence se dédit. Il en mourut de chagrin. La belle lamina se rendit au village pour veiller son corps, elle le recouvrit d'un linceul qu'elle sortit d'une coquille de noix. Elle suivit le cortège funèbre mais ne pénétra pas dans l'église.
Une époque révolueIl est intéressant de remarquer comment plusieurs légendes — indifféremment du XIXe ou du XXe — font état des laminak comme appartenant à un passé proche mais révolu. Leur disparition est expliquée soit par l'ère industrielle (par exemple le développement des manufactures d'armes de la ville d’Eibar), soit par les avancées de la christianisation : les laminak auraient disparu des environs à cause des processions des Rogations, ou du son des cloches de l'église, ou de la construction d'un ermitage ou d'une chapelle.
Croyance en l'existence des laminakToutefois, en 1972, Barandiarán signalait que jusqu'à une époque relativement récente, certaines personnes continuaient à croire en l'existence des laminak. Ces croyances prenaient l'aspect d'un compromis que résumaient deux proverbes basques : « tout ce qui a un nom doit exister » ; « on ne doit pas croire qu’ils existent ; il ne faut pas dire qu'ils n'existent pas ». On faisait aux laminak des offrandes de nourriture, gâteaux de maïs, bouts de jambon, verres de cidre laissés le soir dans la cuisine, terrine de lait ou de caillé que les bergers déposaient dans certaines grottes, aliments que les paysans plaçaient à la limite de leurs champs en guise de propitiation.
(source : wikipedia)