LE BARDO THODOL, le Livre des Morts Tibétain[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Le Bardo Thodol, sous-intitulé « Livre des Morts tibétain » n’est pas un guide des morts mais un guide de tous ceux qui veulent dépasser la mort, en métamorphosant son processus en un acte de libération. Car nous passons, en mourant, par les mêmes étapes que celles que nous traversons dans les stades progressifs de la méditation. Par la coupure automatique de l’enveloppe corporelle, la mort nous donne visiblement une occasion exceptionnelle de nous libérer de l’emprise de nos instincts obscurs, et nous permet d’apercevoir la lumière libératrice, ne serait-ce qu’un instant.
Les étapes que la conscience va parcourir, ses premiers pas dans l’au-delà, sont décrites au mourant — puis à son effigie après ses funérailles — selon une chronologie rigoureuse. Afin d’espérer être libéré de la roue des incarnations successives, le Samsara, la connaissance de cet itinéraire et de ses nombreux pièges est indispensable à celui qui est en passe de se défaire de son incarnation du moment. Une connaissance qui, si l’on n’y a pas accédé de son vivant, reste permise jusqu’à l’instant même du grand passage
Guide de la libération par-delà la mort, le Bardo Thôdol est étudié par les bouddhistes tibétains et lu au chevet des mourants. A la différence du Livre des morts égyptien, le Bardo Thodol n'est pas un itinéraire pour les défunts, mais une suite d'instructions données à « ceux qui veulent dépasser la mort, en métamorphosant son processus en un acte de libération». Si ses plus anciens manuscrits ne remontent qu'au XIV siècle, l'ouvrage est donné pour un terma, c'est-à-dire un texte retrouvé dans une cache où il aurait été déposé, lors d'une période peu propice à sa divulgation ; il est donc censé être de beaucoup antérieur à sa découverte. Ainsi, son origine remonterait à Padmasambhava.
La signification des mots Bardo Thodol est la suivante : Libération par entendement dans le plan qui suit le mort.
Ce traité de la mort aborde avec assurance le problème difficile, la pierre d'achoppement du Bouddhisme, le point où finit un « cycle et où commence le suivant », c'est-à-dire le mécanisme de la réincarnation. De plus, le Bardo Thodol détermine, par le Jeu des « attractions et répulsions, non seulement les parents, mais « aussi le sexe de l'être qui s'incarne. »
Le Bardo Thodol (de même que le Livre des Morts égyptien) est un ensemble de traditions successives, transmises de « bouche à oreille » pendant de nombreuses générations.
Le transfert de la conscienceLe Bardo Thodol doit être lu, correctement et distinctement, soit par un lama, soit par un « frère de la foi », soit par un ami intime, à l’oreille de l’agonisant, puis du défunt. Si le corps a disparu, le lecteur évoque le mort dans sa pensée et opère comme s’il était présent devant lui.
La première condition à réaliser est celle du transfert de la conscience. En d’autres termes, il convient, durant la période d’agonie, d’alerter sans cesse la conscience de manière à lui permettre de se retrouver intacte après la mort et sans avoir subi d’interruption. La mort est presque toujours précédée par un état d’asphyxie bienfaisante, et les eschatalogues modernes (commentateurs du Bardo compris) sont d’accord, en général, pour admettre qu’une période d’inconscience identique existe après la mort.
Le voyage dans l’au-delà commence avec le dernier souffle. Ainsi débute la traversée dangereuse qui peut durer jusqu’à sept fois sept jours, soit quarante-neuf jours, sauf si le karma est particulièrement lourd, auquel cas le trépassé est conduit à renaître avant terme. Ajoutons que le processus de la mort est revécu par le défunt tous les sept jours.
Après la mort apparente, le défunt traverse le Chikai Bardo, au cours duquel il ne comprend pas qu’il est mort et se trouve dans un état proche du sommeil. La récitation de la première partie du livre est destinée à lui faire prendre conscience de son état, à lui épargner les regrets et à le préparer à la Libération finale, qui se manifeste comme la vision de la « Claire Lumière primordiale ». Si, mal préparé et apeurée il ne saisit pas cette occasion d’entrer dans le nirvana, le défunt se trouvera dans le Chonyid Bardo.
Dans le BardoLe Chönyid Bardo ou expérience de l’incertitude de la réalité (la conscience du défunt tente de faire la part des " hallucinations " et de la réalité)
Le Bardo Thodol n’est d’aucune utilité pour les saints. Les hommes évolués spirituellement demeurent dans les régions hautes. Le Bardo Thodo est surtout destiné aux individus ordinaires pour les aider à subir les angoisses et les incertitudes du Bardo d’en bas.
Les désirs de la conscience vont se manifester au mort en prenant « corps » sous forme d’hallucinations répétées qui tentent d’accaparer son esprit. Le bardo lui enseigne à ne pas se laisser capter par ces apparitions fantastiques, terrifiantes, qui prennent l’aspect de démons. L’art tantrique tibétain a représenté ces phénomènes hallucinatoires comme autant de divinités aux symboles bien précis. On les appelle Makalat. Elles apparaissent grimaçantes, encombrées de tout un arsenal de crânes, de crocs, crochets, coutelas, poignards, bâtons, lances, etc., qui les rendent agressives. Mais il ne faut pas s’y tromper. Cet aspect terrifiant signifie seulement qu’elles sont là pour tuer la peur, non pour la susciter. En fait, ces apparitions ne sont que des projections nées de la conscience même du mort. Elles n’ont de réalité qu’en son esprit. Il convient de les reconnaître pour s’en libérer sans crainte, comme n’étant qu’une émanation de l’ego. Tous les poisons, les émotions confuses ressenties dans la vie vont ainsi resurgir.
Après sept jours de nouveaux efforts pour détecter la nature de ces images célestes, les dieux apparaissent sous leurs formes terrifiantes et les images s’obscurcissent.
Le Bardo d’en basLa plupart des morts continuent longtemps à errer, de ci, de là, à la recherche du corps qui leur manque. Souvent, ils essaient de rentrer dans leur propre cadavre, bien que celui-ci soit déjà en cours de dissolution. La souffrance des errants est grande, à ce moment, à cause de leur impuissance à s’évader des étages inférieurs du Bardo.
Si le le mort réussit à demeurer dans le vide de la plénitude de la lumière sans objet, il aura atteint la libération définitive, sera libéré des incarnations futures et accèdera ainsi au Nirvana.
LE LIVRE DU BARDO TODOL
Son ContenuL’ouvrage contient la description des transformations de la conscience et des perceptions au cours des trois états intermédiaires qui se succèdent de la mort à la renaissance, ainsi que des conseils pour échapper aux réincarnations, ou du moins obtenir une meilleure réincarnation : Le chikhai bardo ou étape du trépas, suivant immédiatement la mort : une lumière extrêmement brillante apparait qui est la vraie nature de l’esprit ; la personne suffisamment avancée sur le plan spirituel la reconnaitra et saura se fondre avec elle, et ainsi échapper définitivement aux renaissances. Dans le cas contraire, sa conscience s’estompe totalement pendant sept jours jusqu’à l’étape suivante.
Le chonyid bardo ou étape de l’expérience de la réalité : elle survient sept jours après l’étape précédente. La conscience se réveille et perçoit un mandala de 42 déités sous leur forme paisible ; après sept autres jours il est remplacé par un mandala de 58 déités courroucées. Si le défunt peut les reconnaitre comme des formes de réalité de la conscience et les "prendre pour mères", il peut encore éviter de poursuivre son chemin vers la renaissance, ou se préparer à une meilleure réincarnation.
Le sidpa bardo ou étape de la renaissance : après un certain nombre de jours, le défunt acquiert un corps mental doté des 5 sens ; il peut voir sa famille, circuler dans le monde en traversant les obstacles. Il a ensuite la vision de ses bonnes et mauvaises actions comptées respectivement à l’aide de pierres blanches et noires. Puis Yama se saisit de lui et le dévore organe par organe jusqu’aux os. Enfin arrive le moment de la réincarnation, à moins qu’une technique de dernier ressort, dite "obturation de l’entrée de la matrice", n’évite la venue au monde. Celle-ci peut se faire dans l’un des six états suivants : déité, déité inférieure, humain, animal, esprit avide, esprit torturé. Dans le cas d’une réincarnation humaine, la conscience est attirée par la vision du couple parental engagé dans l’acte sexuel.
Sont également décrits dans le texte trois autres bardos qui ne sont pas spécifiques à la mort, mais appartiennent à l’expérience des vivants : celui de l’état de conscience ordinaire, celui du rêve, celui de la méditation.
L’ouvrage mentionne les rituels à observer et les 4 prières récitées par les lamas. Dans le cas où le corps n’est pas présent, une effigie sur papier du défunt, appelée jangbu, est attachée à un bâtonnet et placée sur l’autel. À l’issue du rituel, le lama la brûle, libérant ainsi l’âme de ses fautes ; celle-ci se réincarne aussitôt.
La version intégrale contient de plus des descriptions des différents signes annonçant un proche trépas, et comment éventuellement en repousser l’échéance. L’ensemble témoigne de l’expérience de la formation et de la dissolution des divers états de conscience, obtenue grâce à la méditation. Un parallèle a été fait entre le chikhai bardo et l’expérience de mort imminente. On reconnait également l’influence des croyances et pratiques pré-bouddhiques appelées Bön et des traditions populaires.