LES DAMES BLANCHESL’appellation dame blanche est donnée à des mythes ou apparitions de natures diverses. Il peut s’agir:
d’entités surnaturelles tenant les rôles de fées, de sorcières, de lavandières de la nuit ou d’annonciatrices de mort prochaine; de fantômes de femmes décédées lorsqu’il s'agit de spectres hantant des châteaux ou d’auto-stoppeuse fantômes.
Quelle que soient leurs formes, les légendes des dames blanches se retrouvent un peu partout en Europe et aux États-Unis.
Dans le folklore ancien, il s’agit de fées, moitié déesses, moitié sorcières, que l’on rencontre dans tous les pays du monde. Elles ont une parenté évidente avec la reine Guenièvre de la légende arthurienne et la fée Mélusine. Elles habitent les nuits des landes et les forêts et s’attaquent parfois aux rares passants.
Elles sont encore connues dans les sites suivants:
la chute Montmorency (Québec) ;
Tonneville (France, Manche) ;
le lac de Paladru (France, Isère) ;
de nombreux lieux dans les Pyrénées (daunas blancas, damas blancas), notamment des grottes ayant constitué des habitats préhistoriques. En Comminges, les Aubegas, en Barousse, les Blanquetas.
Dans le légendaire pyrénéen, on trouve des dames blanches, assimilables à des personnes de sang royal ou princier (ou à leurs spectres), qui jouent un rôle protecteur. C’est le cas en Andorre, où une dame blanche apparaissait près de la cascade d’Auvinyà. Elle habitait une tour voisine et est apparue à plusieurs reprises pour défendre le territoire andorran contre les visées d’un évêque d’Urgel, puis contre les attaques d’un loup monstrueux qui n’était autre que cet évêque métamorphosé.
En Ariège, une dame blanche, princesse aragonaise, vivait au château de Puivert, au pied d’un lac. En 1289, une violente crue de l'Hers provoqua la rupture du verrou du lac de Puivert. Les eaux se répandirent dans la vallée, détruisant l’ancienne ville de Mirepoix. La catastrophe fut imputée à l'intervention de la dame blanche.
Une variété de dame blanche est constituée par les lavandières de la nuit. C’est un mythe présent dans de nombreuses régions d’Europe, sous des noms divers : Kannerez-noz, Night washerwoman, Bean nighe, Lavandeira Da Noite, Lamina, Bugadiero, Gollières à noz, etc.
« On appelle lavandière de nuit des femmes blanches qui lavent leur linge en chantant, au clair de lune, dans les fontaines écartées ; elles réclament l’aide des passants pour tordre leur linge et cassent les bras à qui les aide de mauvaise grâce. »
La dame blanche annonciatrice d’une mort prochaine est la transposition continentale de l’ancien mythe irlandais de la banshee, repris dans la légende de la fée Mélusine au XIVe siècle : attachée à la puissante lignée des Lusignan, son apparition sur une des tours du château de Lusignan, accompagnée de hurlements lugubres et de sifflements, annonçait la mort d’un membre de la famille dans les trois jours.
Selon Érasme: « Un des faits les plus connus demeure l’apparition de la dame blanche aux familles princières. ». Au début du XVIe siècle de nombreuses grandes familles aristocratiques européennes avaient leur dame blanche attitrée. Plus stylées que leurs ancêtres, elles ne hurlent pas et peuvent même parfois se montrer protectrices, telle la « dame blanche de Krumlov », attachée à la puissante famille Rožmberk (Rosenberg) de Bohème qui apparut plusieurs fois en 1539 auprès de l’héritier nouveau-né. La dame blanche attachée à la maison germanique des Neuhaus est ambivalente, elle annonce une mort si elle porte des gants noirs, mais aussi un heureux présage si ses gants sont blancs. On trouve des dames blanches attachées aux Habsbourg, aux Hohenzollern, aux Brunswick, aux Brandebourg, aux Bade, aux Pernstein. Une dame blanche serait aussi apparue à l’empereur Charles Quint en 1558, la veille de sa mort, au monastère de Yuste où il s’était retiré. C’est cette dame blanche qui a donné lieu à la personnalité de la « Nonne Sanglante ».
Dame blanche messagère de mort au XIXe siècle: La double apparition d’une dame blanche au prince Louis-Ferdinand de Prusse, la veille et le jour de sa mort tragique sur le champ de bataille de Saalfeld, eut pour témoin le comte Grégoire Nortiz qui, prussien d’origine, passa en 1813, au service de la Russie et mourut, en 1838, aide-de-camp du Tzar Nicolas. Le comte Nortiz rédigea, quelques heures après l’évènement survenu au château du duc de Schwarzbourg-Rudolstadt le 9 octobre 1806 vers minuit, un récit qui est conservé dans les archives de la Maison des Hohenzollern».
En juillet 1832, c'est à l'Aiglon, fils de Napoléon Ier, qu'elle serait apparue la veille de sa mort.
En novembre 1835, alors que le prince de Montfort résidait à Stuttgart auprès de son oncle le roi Guillaume Ier de Wurtemberg, une dame blanche serait apparue dans une galerie du vieux château, annonçant par sa présence l'imminence d'un décès. Le présage, rapporté par des sentinelles, aurait été pris au sérieux par le roi, qui s'inquiéta pour sa sœur, la princesse Catherine de Wurtemberg, mère du prince de Montfort. Celle-ci mourut effectivement à Lausanne le 29 novembre 1835.
Cette même dame blanche, que la tradition présentait comme le spectre d'une folle infanticide, serait déjà apparue en 1819 à la veille de la mort de Catherine Pavlovna de Russie, seconde épouse du roi Guillaume.
En 1889 un domestique aurait vu une dame blanche roder dans le parc de Mayerling la nuit du célèbre drame. Pendant son séjour à Caux, près de Montreux, l'impératrice Sissi prétendit, le 30 août 1898, avoir vu distinctement la dame blanche la nuit, soit 11 jours avant son assassinat à Genève. Une dame blanche semble avoir annoncé la mort prématurée du grand-duc Viatcheslav Constantinovitch de Russie.
De nos jours, les dames blanches semblent avoir cessé d’annoncer les décès aristocratiques, mais elles restent très présentes en tant que fantômes de lieux (grande hantise), essentiellement dans des châteaux ou des abbayes, où elles sont fréquemment censées garder un trésor légendaire:
Une évolution récente du mythe de la dame blanche est celui de l’auto-stoppeuse fantôme. Il s’agit presque exclusivement d’apparitions de jeunes femmes, même s’il existe quelques cas d’autostoppeurs. Dans le scénario le plus courant, une jeune femme habillée en blanc fait de l’autostop la nuit et, après être montée dans un véhicule, disparaît brusquement, soit à l’approche d’un passage dangereux en poussant un cri d’alarme, soit en arrivant à une adresse donnée. Ce phénomène est connu un peu partout dans le monde et est généralement considéré comme appartenant aux légendes urbaines.
Contrairement aux dames blanches « fées » ou « messagères » qui sont des entités, les auto-stoppeuses fantômes semblent être toujours le fantôme d’une personne contemporaine décédée accidentellement.