Le 16 décembre 1916, le prince Ioussoupov et le grand-duc Dimitri Pavlovitch décident de mettre fin à la vie de Grigori Raspoutine, moine débauché, entré dans les faveurs de la famille impériale en raison de ses pouvoirs de guérisseur.
Réputé pour faire des miracles, Raspoutine n’était-il qu’un moujik ivrogne mais intelligent ou un vrai guérisseur aux pouvoirs hors du commun ?
Les débuts de RaspoutineGrigori Iefimovitch Raspoutine dit Raspoutine est né probablement en 1869. Il vient d’un petit village sibérien qu’il a quitté pour se consacrer à la religion, à la méditation et à l’errance. Après quelques années de ces vagabondages, il acquiert une réputation de saint homme (starets) et de guérisseur. (Starets ou stariets (mot russe signifiant vieillard. Dans l’ancienne Russie, saint moine ou ermite, considéré par le peuple comme prophète, ou thaumaturge.)
En 1904, il quitte la Sibérie pour se rendre à Saint-Pétersbourg et vient demander l’hospitalité à l’Académie de théologie.
L’évêque Hermogène et le grand prédicateur Illiodore sont séduits par sa foi et favorisent son entrée dans la société de la capitale.
Dès lors, Raspoutine commence à faire parler de lui. Il est réputé pour faire des miracles mais également pour être l’initiateur de nombreuses débauches.
Le faiseur de miraclesLa cour du tsar Nicolas II vit un drame familial. Le tsarévitch, Alexis, unique héritier de la couronne, est atteint d’hémophilie, maladie incurable à l’époque.
La réputation de Raspoutine est arrivée aux oreilles de la tsarine Alexandra. Par amour pour son fils, elle convoque le moine guérisseur.
On sait de source sûre que Raspoutine a, à plusieurs reprises, atténué les souffrances du garçon. Il a également réussi à stopper plusieurs hémorragies qui auraient dû être fatales. Il le sauvera encore lors de graves hémorragies en 1912 et 1915. Aussi est-il vénéré par l’impératrice comme l’« homme de Dieu » voué à sauver son fils et la Russie.
Chaque fois que Raspoutine se rend au chevet de l’enfant, on assiste à une nette amélioration de son état de santé. Difficile de parler de simple coïncidence.
Nul ne sait quelle technique utilise Raspoutine. Une chose est certaine, son influence sur la tsarine et sur la Cour est de plus en plus importante.
Un mystique débauchéLa famille impériale voue à Raspoutine une telle amitié qu’on commence à le surnommer le « tsar au-dessus des tsars ». Cependant Grigori Raspoutine abuse cyniquement de bon nombre de ses admiratrices ou des solliciteuses et s’adonne de plus en plus ouvertement à la débauche.
Tout en abusant des jolies filles, il leur parle de Dieu et de la rédemption.
Cette vie de débauche bien connue ne l’empêche d’ailleurs nullement d’avoir autour de lui une cour féminine prête à tout pour lui.
L’appartement de Raspoutine devient le lieu de passage obligé de toutes les sollicitations possibles provenant des personnages les plus importants.
En 1916, le président du conseil Sturmer et le ministre de l’intérieur Protopopov participent aux séances de spiritisme qu’il organise régulièrement.
Attaqué par la presse, il est l’objet d’une discussion à la douma en 1912, mais les diverses démarches pour faire comprendre à Nicolas II les risques qu’encourt le régime du fait de ses relations avec le prétendu homme de Dieu demeurent vaines.
La haine qu’il inspire est très probablement à l’origine du mythe de l’omnipotence qu’on lui prête. Si la tsarine est à ses ordres, le Tsar ne tient en réalité pas compte de ses conseils.
Un assassinat programméEn 1916, les défaites de la Russie au front et la décomposition de l’Etat suscitent une grande indignation dans tout le pays.
Tout va mal et le responsable est tout de suite trouvé. C’est la mauvaise influence de Raspoutine sur le Tsar qui provoque ces désastres.
La défaite de l’armée s’explique, selon l’opinion publique, par le fait que Raspoutine est vendu à l’Allemagne.
Raspoutine devient un monstre à abattre. C’est le jeune prince de 19 ans, Felix Ioussoupov, qui va se charger de cette mission.
Le 29 décembre 1916, il invite Raspoutine chez lui sous le prétexte de lui présenter une femme pour laquelle il languit depuis longtemps. Avec ses complices, le prince fait préparer des gâteaux imprégnés d’une dose de cyanure capable de tuer 20 personnes et verse en supplément ce poison dans le verre destiné à l’invité.
Arrivé chez le prince, Raspoutine mange et boit. En principe, une telle dose de cyanure aurait dû le tuer en quelques minutes mais il continue à se porter comme un charme pendant plus de deux heures.
Le prince est à bout tandis que le moine redemande à boire. Décidé à en finir, Ioussoupov prend son revolver et tire à bout portant.
Juste après la détonation, les complices arrivent accompagnés d’un médecin. Ce dernier examine le corps mais Raspoutine est toujours vivant.
Enfin, il cesse de respirer et le corps est descendu au sous-sol du palais. Mais, quelques minutes après, Raspoutine se relève et tente d’étrangler le prince.
Il faudra quatre nouvelles balles et des coups de matraque qui lui défoncent le crâne pour que Raspoutine cesse de se débattre.
Les conjurés enveloppent alors le corps et le jettent dans la Neva.
Quand on découvrira le cadavre dans l’eau, on constatera que Raspoutine était toujours en vie quand il a été jeté dans le fleuve. En réalité, il est mort noyé.
Il est certain que cette endurance vraiment exceptionnelle a contribué au mythe du surhomme.
Raspoutine était-il insensible au poison ? . Une chose est sûre, il possédait une constitution hors du commun.