Les vaccins imparfaits
On les appelle les "vaccins imparfaits". Ils protégeraient les individus vaccinés tout en permettant au virus de survivre et d'évoluer pour devenir plus virulents. Un phénomène observé par une équipe de chercheurs britanniques, mais dont les explications restent floues et controversées.
Ces nouveaux virus, boostés par les vaccins, infecteraient ainsi les sujets qui n'ont pas été vaccinés, les rendant encore plus malades, expliquent ces chercheurs dont les travaux paraissent dans la revue américaine PLOS Biology, le 27 juillet 2015.
Ces hypothèses s'appuient sur des tests effectués sur le vaccin imparfait contre une maladie vétérinaire : le virus de Marek, affectant les volailles.
Les poulets non-vaccinés et infectés "sont morts en dix jours tandis que ceux avec le vaccin ont survécu, mais en continuant de transmettre un virus plus dangereux aux autres volailles avec lesquelles ils étaient en contact", explique le professeur Venugopal Nair, l'un des principaux co-auteurs de ces travaux.
Aucune certitude…La maladie de Marek est de plus en plus virulente, depuis la fin du XXe siècle. Dans les années 1950, cette maladie tuait rarement. Aujourd'hui, la mortalité frôle les 100%. Pour les chercheurs, cette augmentation de la dangerosité du virus pourrait s'expliquer par l'apparition du vaccin dans les années 1970.
Cependant, les auteurs expliquent "ne pas savoir avec certitude" si c'est le vaccin qui est responsable de la virulence des souches. Ils n'ont en effet pas pu le prouver. Car ce phénomène n'est pas aussi clair que l'évolution des microbes qui deviennent résistants aux antibiotiques, relèvent-ils.
Cette recherche a simplement le mérite de mettre en lumière "une forte corrélation" entre vaccination et développement de souches du virus de Marek beaucoup plus dangereuses pour les volailles.
Aucun vaccin humain n'a augmenté la virulence d'un virusCes observations se basent sur des hypothèses plus anciennes, qui restent encore aujourd'hui controversées au sein de la communauté scientifique. "La théorie du vaccin imparfait est fortement controversée", ajoutent comme préambule à leur étude les chercheurs.
Ces postulats expliquent que, dans certains cas, les vaccins en augmentant la survie de l'hôte, permettent au virus de vivre plus longtemps dans leur habitat naturel.
Comme la personne ne meurt pas, le virus pourrait alors se transmettre, se répliquer et évoluer pour être plus agressif. Cependant, ces explications restent théoriques, car "aucun vaccin humain n'a augmenté la virulence des agents pathogènes ciblés", précisent les auteurs.
D'autant plus que ce phénomène n'a été observé, jusqu'à présent, qu'avec des vaccins à destination des animaux... Les vaccins humains actuels sont "parfaits", permettant à la fois de protéger les personnes contre les virus et d'empêcher la transmission.
L'avantage d'une protection, même risquée ?Ces vaccins sont conçus pour reproduire une forte réaction immunitaire que le corps humain développe naturellement après avoir été exposé à ces maladies. Dans la mesure où il est quasiment impossible de développer une immunité naturelle totale contre des infections comme Ebola, le VIH ou le paludisme, il est probable que les premiers vaccins efficaces qui seront produits seront "imparfaits" avec un risque d'intensifier la virulence de ces virus, spéculent les chercheurs. Néanmoins, toute protection, même minime sera une avancée dans la lutte contre ces maladies dévastatrices.
Dans tous les cas, cette étude ne doit en aucun cas être interprétée comme un argument pour les anti-vaccinations. Au contraire ! Elle renforce le fait qu'une couverture vaccinale très élevée est nécessaire pour empêcher la circulation de certains virus.
Cet effroyable phénomène, inconnu du grand-public pour l'heure, ne serait t-il pas révélateur du manque d'encadrement de l'utilisation des vaccins à l'heure actuelle ainsi que du manque de recherche sur les conséquences de l'utilisation de vaccins sur les animaux, homme inclus ?
Source: Imperfect Vaccination Can Enhance the Transmission of Highly Virulent Pathogens
A. Read et al. Plos Biology, juillet 2015. DOI: 10.1371/journal.pbio.1002198